Avant course
Un grand week-end de sport ! Le summum du triathlon universitaire ! Le plus grand rassemblement de jeunes triathlètes au monde ! Les pros de demain !
Les superlatifs sont le propres des américains et la raison d’être des speakers en général mais pour une fois j’ai comme l’envie d’en partager certains. Beaucoup d’attente et d’espérance en effet pour moi à ces championnats universitaires de triathlon. La semaine qui précède la tension monte gentiment. Les mails de rappel pour le vol, les meetings extraordinaires du club, la coach qui se met à donner des conseils à tout va ainsi que les innombrables mails de la fédération sur les parcours, briefing, horaires et autres ne font qu’augmenter la pression. Personnellement, je peux avouer maintenant avoir à ce moment-là quelques doutes sur ma performance en course à pied même si je ne l’ai dit à personne. J’ai l’impression de ne pas avoir couru en compétition depuis une éternité. Clermont ne date que d’un mois en arrière et pourtant la semaine de vacances chez Nadine à San Fransisco pour spring break m’a fait perdre la notion du temps. Etant seul, j’ai moins couru que les années passées et avec toutes les espérances que le club met sur moi à la fois pour le sprint et l’olympique, le mental travaille au point où je dois me forcer pour ne pas trop tirer durant la semaine car « non, ce n’est pas le moment de faire quelques sprints pour se tester une ultime fois ! ». Le stress quoi, juste un peu plus que pour les autres compétitions que j’ai faites ici aux USA comme il ne s’agissait jusque-là que de courses sans trop d’importance (mis à part Clermont). Et avant cela, il faut remonter jusqu’à Zug pour le dernier triathlon qui comptait véritablement, d’où peut-être la sensation d’éternité…
Départ donc le jeudi matin en direction de l’aéroport où notre vol en direction de Tempe (Arizona) nous attend. Seul deux de mes camarades de club prennent le même vol que moi, mais nous partageons l’avion avec l’équipe de l’université de Clemson. Les pauvres bagagistes font donc de grands yeux lorsqu’ils doivent sortir une bonne quinzaine de valises vélo à la borne oversized luggage. Après un aller à l’hôtel dans notre voiture de location, un sandwich au magasin d’en face, un retour à l’aéroport pour changer de voiture et éviter ainsi les frais de surclassement qu’ils nous ont ajouter automatiquement, et finalement un peu de devoirs au Starbucks du coin en attendant les camarades, le weekend de sport est prêt pour commencer. Première étape : repérage du parcours vélo avec Nick. Thomas, Nick et moi étions les trois du club censés faire le sprint et l’olympique même si Nick a dû y renoncer au sprint suite à une blessure et pour se conserver pour l’olympique. Le sprint est sous format ITU avec drafting mais limité à 75 places pour tous les USA tandis que l’olympique du lendemain est ouvert à tous les universitaires. Le parcours tourne pas mal, mais les virages sont larges en général. Une petite montée à noter sur le parcours sprint, une autre sur l’olympique. Celle du sprint peut jouer un petit rôle mais autant dire que sur l’olympique ça ne représente presque rien et c’est juste pour éviter qu’on dise que c’était pancake flat. Retour à l’hôtel pour une douche et ensuite on retourne sur la zone de transition pour un briefing. Bien que spécial pour les athlètes du drafting, le briefing ne s’attarde que sur les lapalissades du triathlon en ciblant les débutants. Bref, je récupère mon dossard et après un souper au Olive Garden du coin, tout est prêt pour demain.
Draft-legal sprint
Le matin du vendredi, je me rends donc sur le lieu de la course tout seul à vélo. Il fait déjà relativement chaud et il n’est pourtant que 7h30 du matin et le soleil se lève à peine. Avec mon numéro 59, je suis relativement à la fin de la zone de change mais ça ne change pas grand-chose. J’y place mes affaires et appelle vite fait mes camarades pour être certain qu’ils m’apportent ma neopren comme prévu comme elle a été autorisée en dernière minute contrairement aux annonces de la veille.
Lors de l’appel par ordre des numéros, nous pouvons rentrer dans l’eau et nager 50 mètres pour rejoindre le départ contre le mur du lac. Le parcours natation est ensuite constitué de deux boucles de tailles différentes mais sans sortir de l’eau. Je suis placé plutôt sur la droite du départ, une bonne place à mon avis. Le premier aller jusqu’à la bouée jaune est par contre très difficile. Je me fais coincer, taper, retenir les bras, quelqu’un s’arrête devant moi remettre ses lunettes, lunettes qui sont de travers chez moi aussi, … en gros un des départs les plus bagarreur que j’ai eu vu. Dur, dur et après seulement 150 mètres j’ai déjà l’impression d’avoir perdu un temps fou. La suite est un peu plus smooth et je me mets même à dépasser sur la fin. Le groupe que je vois devant est par contre un peu trop loin.
Au départ vélo, je suis donc assez seul avec me semble-t-il un groupe devant. Je remonte sur un certain Honeycutt, qui m’avait été proposé pour aller à Clermont et que notre coach connaît bien. Je le lâche assez vite et revient sur un athlète de Stanford. Il refuse par contre de collaborer et je cesse donc de tirer après un peu moins d’un tour sur les quatre et peu de temps après un grand groupe nous rejoint par l’arrière avec notamment mon collègue Thomas. Les tours passent et se ressemblent à vrai dire : je prends quelques relais, avec plusieurs autres et certains se contentent de faire des semblant d’attaque dans la petite montée mais rien de percutant. Les virages sont aussi un point où je suis bien plus habile que la plupart qui consomment leurs freins sans réfléchir.
Arrive donc la transition. Je suis en milieu de groupe je dirais et après une très bonne transition sort plutôt avec la tête. Trois autres dont Honeycutt et Thomas donnent le rythme et me lâche petit à petit. Je me fais passer alors par quelques athlètes du groupe et prends mon gentil rythme que je finis par tenir sur tous les deux tours me semble-t-il. Quoique je dois dire que Thomas m’a pris 50 mètres sur le premier aller puis presque plus rien et que je suis même revenu sur un autre de la Navy à la toute fin de course pour le poser à 80 mètre de la ligne.
Focus sur l’olympique
Au final, je suis 9e, ce qui est meilleur que je pensais après l’arrivée dois-je dire. Un peu déçu d’avoir été battu par Thomas mais généralement content de ma performance même si, comme d’habitude, ma course à pied s’est révélée un peu faible. Pas le temps d’analyser toutefois, il me faut maintenant tester les boots de compression de Normantek et boire mon milk chocolate de récupération. L’olympique de demain se prépare déjà maintenant. Je récupère en effet mon vélo ainsi que mon dossard 42 pour demain et rentre à l’hôtel assez rapidement après avoir été félicité par tous les collègues qui sont venus m’encourager.
L’après-midi, je suis presque prêt à aller avec eux faire un décrassage vélo. Toutefois, et sur conseil de Nick et de la coach, je finis par faire une bonne sieste et user mes chaussettes de compression au frais dans la chambre d’hôtel avec constamment une gourde à portée de main. Vers trois heures, je suis pris d’une soudaine faim et retourne me chercher un sandwich alors même qu’à 16h30 nous partons pour le souper officielle. Deux bonnes portions de pâtes et un morceau de poulet plus tard, j’ai le ventre bien plein et ce doit être la première fois depuis longtemps que je suis au lit avant 20h. Il faut dire tout de même que le réveil est programmé pour 4h30 demain avec un départ à 7h30 et beaucoup d’athlètes attendus dans la zone de change.
Olympique
Le trajet jusqu’à la zone de change se fait de nuit cette fois-ci puisqu’il n’est que 5h30 lorsque nous quittons l’hôtel avec Nick. Nous sommes tous deux dans la première vague, tout comme Thomas mais il fait son weekend pour lui et pas avec le team. Je m’échauffe normalement avec toutefois des cuisses qui sentent un peu la fatigue de la veille, mais ça va aller comme je dis à la coach. De toute façon, ça doit aller et c’est pas une question !
Hymne américain, rentrée dans l’eau, nage jusqu’au départ au milieu du lac et petite attente plus tard, le départ est déjà là. La natation est bien plus tranquille que la veille et je peux nager relativement confortablement. J’ai malgré tout l’impression que ça s’échappe devant à l’aller déjà. Au retour, le peloton me semble bien plus clairsemé et j’essaie de suivre des bulles par-ci par-là. Sortie de l’eau et montée sur le vélo très rapide pour moi et me voilà lancé sur les deux boucles de 20 kilomètres. Sur les premiers cinq kilomètres, une série de vélos de contre-la-montre me passent à plein gaz et j’ai aucun moyen de les suivre, n’y même d’essayer parfois. Je ne sais pas si ce n’était qu’une impression ou si les forces me manquaient vraiment mais les cuisses tiraient et par rapport aux autres je n’avais pas de rythme. Après ce passage difficile (au moins pour le mental), deux athlètes me dépassent et je peux m’accrocher à leur tempo. J’ai par ailleurs finis le vélo avec un des deux, en jouant parfois au chat et à la souris sur le deuxième tour où il nous faut dépasser sans cesse les concurrents des vagues suivantes. La course avec le vélo dans la transition est un peu plus lente qu’à l’habitude comme je suis un peu coincé par un autre, mais je transite assez vite encore une fois et me voilà sur l’étape de vérité : 10km de càp où il faudra voir ce qu’il reste dans ces jambes après un sprint la veille, 40km de vélo et quelques doutes sur leur capacité.
Qui parle de doutes ? Non mais, il y a un temps pour cela et ce n’est certainement pas pendant la compétition ! Je pars donc sur un bon rythme et me fixe sur la série d’athlètes que je vois devant moi. Je me sens bien même si les jambes sont assez à vouloir tirer, elles prennent le rythme extrêmement rapidement et sans pouvoir forcément accélérer, j’ai certainement un rythme comparable à celui de la veille et suis capable de le tenir. Heureusement, les postes de ravitaillement sont nombreux car il fait soif et je ne veux pas en perdre un seul contrairement au sprint où un gobelet m’est tombé des mains. Je bouffe littéralement du monde en continu et regarde encore plus devant, la sensation est formidable. Même la combinaison zébrée du Texan qui est sorti peu avant moi et qui me résistait depuis longtemps finit par céder aux alentours du 8e kilomètre et un seul concurrent me dépasse sur la toute fin de parcours.
Je ne sais ni mon temps, ni ma place pour l’instant mais suis très content de ma course. Je fais un petit bain de glaçon pour les jambes sous la tente d’arrivée et une séance de compression chez Normantek à nouveau. Je ne vais pas dire que je suis frais, car ce serait quand même bien exagérer mais je me sens bien, incroyablement bien même. Les autres athlètes du team rejoignent chacun à leur tour l’arrivée. Je prends alors mes splits à la tente des résultats : 19’30 en natation, 55’ à vélo (qui est un peu trop court paraît-il) et 37’01 à pied pour 1h54’28 au total. 27e place (corrigée à 26 aux résultats officiels du soir). Content, l’ai-je assez dis : ultra-content ! Un hamburger et une salade de pâtes plus tard (post-race food à l’américaine quoi), je sors mon vélo, enfile un short et profite du soleil à torse nu pour regarder courir les filles. Les pauvres ont dû souffrir de la chaleur mais je peux vous dire que tous les concurrents sont restés mettre l’ambiance (et prendre des coups de soleil). J’ai l’impression de pouvoir courir presque à nouveau, même si un début de crampe à la jambe droite et une grosse envie de sieste à peine les courses et l’excitation terminée me rappelle de tous les efforts concédés. C’est ainsi que nous rentrons à l’hôtel à vélo à nouveau, remettons le vélo dans la valise et partons manger un bon gros bbq pour finir ce beau weekend avec le ventre bien plein. Le soir, nous nous retrouvons une fois encore à ne rien faire dans le lit avec une partie du groupe partant pour l’aéroport tandis que moi et deux autres restons dormir et laissons tombé les idées de fêtes qui allaient pourtant de soi trois jours plus tôt. Enchaîner les deux courses à moins de 24h d’intervalle a très bien passé, mais la récupération est importante… et ça passe bien aussi.