NN Marathon Rotterdam
Pace-makers en préparation
Il est de ces choses que tous les plans standards déconseillent ; faire un marathon tôt dans sa première saison PRO ironman en fait à coup sûr partie. Pourtant, nous voici à Rotterdam, une semaine seulement après un gros week-end chargé de vélo à Porrentruy pour tenter de prémâcher 42km de bitume pour Melina. L’idée est de tenir les 2h50 et passer un bon week-end en groupe. De toute façon en triathlon, et selon les dires mêmes de la fédération, nous ne sommes pas professionnels mais « athlètes au niveau équivalent à des PRO sur longue distance » ; alors pourquoi pas un peu de fun dans notre hobby ?
Pre-race picture à l'expo.
Sortant de 500km de vélo en 5 jours le lundi, le programme de la semaine se veut plutôt léger. Même avec un peu de marge sur le marathon, on ne s’attend pas non plus à une tasse de thé. Footing le mardi soir avec le TVO avec quelques sections en rythme de 4:00/km, repos le mercredi (avec une discussion intéressante avec Magnes à propos de capteurs de puissance et analyse de données, mais les détails seront pour une autre fois), voyage et footing léger le jeudi, repos le vendredi, et pre-race footing le samedi. L’ambiance est cool, et le stress pas présent pour nous pour une fois ; pace-maker ne ressemble pas accidentellement à peace-maker.
Départ aisé
Le marathon s’est toujours trop simple au début ; sinon, ce sera trop dur à la fin. Melina vise entre 4:02km et 4:04/km. On marche ensemble jusqu’au départ, cause, court un peu en profitant de la musique et passe par nos différentes pauses pipi. Quand elle nous quitte pour rejoindre son groupe A « Fast-Runners » alors que nous devons nous contenter du B (finalement juste derrière, à moins de 10s), Jean-Claude me jette un « c’est précis, t’arrive à viser si juste ? ». Malheureusement, je ne crois pas ; faudra se caler un peu sur comment elle réagit au début. On verra quoi.
Le départ juste devant le pont est sympa, mais un peu serré. On ne se stresse pas trop toutefois, et peut remonter sur elle après que la foule se soit décantée. Bientôt le premier kilomètre, easy peasy, même au temps officiel du canon on est en 4’05. C’est parti mon kiki. Je prends les choses en main devant tandis que Jean-Claude préfère rester à côté un moment. Il me semble me retenir en continu mais les 4:00/km déroulent aisément et les kilomètres défilent les uns après les autres. On tâche de bien profiter des ravitaillements car il fait nettement plus chaud que ces derniers jours. Mis à part ça on profite un max, et on peut même s’échanger quelques mots avec Jean-Claude.
Peu après le départ, la formation est en place.
Trop vite ?
Souvent j’essaie de jeter un regard en arrière voir comment ça suit. Pas le moindre signe de problème et on a déjà un tiers de course derrière nous. Tu crois qu’on est trop rapide ? Je finis par oser la question à Jean-Claude qui finira par la poser à Melina dont je ne comprends que la moitié de la réponse ; quand elle inclut « geile Beine » et « bald die Hälfte », je me dis qu’elle ne pouvait qu’être bonne. Gentiment on a néanmoins un gros groupe qui suit les pace-makers 2h50 ; si elle est la seule à recevoir des verres d’eau au ravitaillement, beaucoup d’autres profitent du rythme régulier et s’abritent du vent lorsque le parcours tourne un peu au passage du semi. Un ou deux viendront même devant demander ce qu’on vise et si ça nous dérange de tout faire devant. Au contraire, faites-nous un bon groupe et on vous emmène volontiers avec.
Pace-makers pour tout un groupe.
Les choses changent pourtant subitement vers le 24e kilomètre. Melina peine un peu à suivre le rythme, quémande un gel, et tandis que nous ralentissons un tout petit peu, notre groupe éclate en morceaux entre ceux qui tiennent et ceux qui ne peuvent pas vraiment tout seul. Merde, est-ce qu’on a vraiment trop forcé ?
Le mur face au vent.
Quand ça commence, c’est difficile
Passage du pont dans le deuxième sens et début des difficultés.
Le marathon ça commence normalement au 30e et ensuite c’est difficile. Et là, on n’est « qu’à » 25 et voilà que ça commence déjà. Ça va ? Grimace. Bon, no stress, quelques kilomètres plus lentement. Si ça revient après, on est toujours dans de très bons temps. Pas facile pour le mental toutefois, quand après n’avoir fait que rattraper du monde sur plus de 10 kilomètres, c’est l’inverse qui se produit et presque aucuns pieds ne semblent tenables. L’intervalle entre chaque panneau paraît alors plus long, ne serait-ce que pour moi. Il reste pourtant un dernier tiers et un tour de lac qui sera certainement interminable.
Je ne regarde personnellement plus la montre au passage des kilomètres du 28e au 32e. Je ne sais pas si cela vaut pour les deux autres, mais il faut plutôt se focaliser à tenir ce que l’on peut à ce moment-là. Seules consolations de ce tour : 1) on n’est pas les seuls à souffrir (Jean-Claude et moi se confiant l’un l’autre commencer à sentir les jambes) à voir certains à la marche ou à l’arrêt en bord de parcours. 2) les vidéos de la famille à Melina sur écran géant au passage du 34e, « luege, mini Mammi », puis papa, parents à Thömu, et Thömu. « I’m so proud of you », lui drapeau suisse à la main, nous sourire aux lèvres et feu aux jambes. L’euphorie ne dure que quelques centaines de mètres avant de reprendre le regard concentré et le rythme précédent. Les 2h50 sont déjà loin à cet instant et je doute franchement pour le PB de 2h53. On se met alors à encourager vocalement.
Dans la tête
Coca du 39e.
Hervé se pointe à 36km avec du coca qu’on avait demandé pour le 39e ; il a probablement vu les passages à la baisse sur le tracking. Melina se tient pourtant à son plan et refuse catégoriquement. A partir de 38, je le prends à la main, et on se retrouve sur le dernier retour. Le vent (s’il y en a encore) devrait être plutôt avec nous. Il nous faut toutefois 3 bons kilomètres en 4:00/km pour espérer 2h53. Et c’est là que la tête prend les dessus. On retrouve des jambes où il n’y en a plus ; à nous de dépasser à nouveau ! Go, go, go ! Je ne sais pas si on y croit ou si on essaie tout de même, mais j’aime mieux ça. Ainsi, jusqu’à la ligne elle aura tout donné et grâce à un sprint final sur les derniers hectomètres et un buste cassé digne d’un sprinteur de 100m, elle obtient le 2h53’12. Exactement le même temps que son PB l’an dernier. Au semi, on estimait 3’ d’avance ; au 32e, 3’ de retard ; au final, c’est égalisé à la seconde près.
Fatigue après l'arrivée.
Sentiment probablement un peu mitigé, les 2h50 sont dans les jambes un bon jour. Tenir ainsi mentalement 20km n’est pas à sous-estimer comme performance toutefois. De mon côté, j’ai beaucoup apprécié la course avec une ambiance pour une fois différente et sans stress. Les quelques secondes au kilomètre de marge font vraiment toute la différence. Ce matin (le lendemain), j’ai mon tendon d’Achille gauche qui est bien tendu et les jambes qui se demandent quand même si c’était vraiment la meilleure solution de visiter Rotterdam en 3 heures. La tête quant à elle est contente de l’avoir fait et d’avoir passé un excellent week-end avec le team « Melina ».
Temps officiel.
par PA the 09-04-2018 at 12:12