IM 70.3 Rappi
Parfois une grosse préparation mène à l'objectif de la saison, comme premier triathlon de l'année aussi. Une certaine pression, mais aussi l'assurance de pouvoir choisir ses blocs d'entraînements et de monter en puissance à l'approche de la course sans trop devoir adapter son plan à d'autre courses. C'était le cas cette année pour le 70.3 Rapperswil.
Préparation
Avec Daniel et David principalement, mais aussi le Rushteam, le TVO, et d'autres connaissance sur le chemin menant à Rappi, les heures d'entraînement s'enchaînent depuis décembre environ pour ma part. Et le bilan juste avant course est le suivant: ma natation ne me plaît pas, mais alors pas du tout. Sauf une fois à Morges en combi, je me sens toujours scotché. Daniel me rassure plusieurs fois en disant que si j'ai pas mon meilleur niveau d'il y a deux ans, j'ai tout de même un très bon niveau pour ironman et les progrès à vélo feront plus que de compenser les pertes en natation. A vélo justement, les kilomètres me manquent un tout petit peu. Je me sens très bien sur certaines séries, mais un peu limite d'autres fois. Si les jambes sont souvent là, la constance peine un peu à mon goût. Je reprends gentiment confiance sur mon contre-la-montre à l'approche de la course, mais pas encore sur route mouillée, prions pour du sec (et pas trop venteux). Finalement à pied, je me sens prêt. J'ai beaucoup couru, et malgré ne pas avoir battu mes records de Payerne et Kerzers, la forme est là, et je tiens mieux sur la durée un rythme aux alentours des 4min/km. Seul bémol dans une préparation bien réussie: une grosse coupure de deux semaines après Porrentruy pour des douleurs au genou gauche. Notons que pour une fois elle a été un peu plus scientifique, au grand dam d'Estelle entre autre qui a dû supporter des TSS, TSB, watts normalisés et autres chiffres plus ou moins importants lors de (trop) nombreuses discussions.
Le reste de nos discussions comportaient aussi un plan de course: départ à fond en natation (i.e. la méthode junior pour s'extraire du pack avant la première bouée), puis gérer mais rapide sur les 1900m. Peu importe si les bras souffrent, ils seront gentiment posés sur les barres ensuite. A vélo, commencer par bien se ravitailler et se mettre dans le rythme gentiment. Tirer la première montée, se reposer dans la descente, puis gérer le plat aux sensations. Tirer la montée du deuxième tour à nouveau, ravitailler pour la course dans la descente, et rentrer à plat au feeling en préparant le semi. Semi sur lequel il faudra éviter de partir trop vite, et ensuite tenir le rythme malgré la fatigue, et dès le 10e idealement, voire 7e km, passer au coca plutôt que l'iso sur le vélo et l'eau au début de la course. Ambitieusement 25min de natation, 2h20 de vélo et 1h20 de course, soit avec des transitions et un poil de marge sous les 4h20.
Dernières 24 heures
Finalement, tout miser sur une course c'est aussi une pression un peu plus importante. Et si la veille je réalise pas encore trop au briefing et me moque un peu des blagues marketing du speaker professionel, et souris gaiment lorsqu'un journaliste de runnersworld.de cherche des athlètes jeunes à interviewer, la réalisation parfaite du stress qui monte arrivera un peu plus tard: après avoir déposé les vélos et sacs dans la zone, petit footing d'environ 4km pour dégourdir les jambes. Et à 5min/km j'ai une bonne boule au ventre. Après un petit kilomètre silencieux, on échange nos sensations et nous trois nous sentons très mal à une allure bien plus lente que prévu le lendemain ! Mais pas de panique : ça m'arrive avant d'autres courses aussi (la dernière fois aux 20km), et ça part en général au coup de pistolet. Dernier repas en commun, lecture des innombrables messages d'encouragement, et au lit à 21h30 car une longue journée nous attend. Yapluka (dixit la reine du Bordelais).
Matin de la course ! Debout avant le réveil, mais bien reposé. Déjeuner et hop en voiture vers Rappi. Et si la veille les discussions allaient bon train, là c'est un silence pesant sur les 40min de trajet. Sur place vérification des vélos (oups le scotch tenant le pit-stop a souffert de la pluie), des sacs, je checke trois fois tout. Petite course, 4 pauses pipi, on enfile la combi et s'approche du départ. L'eau est à 14.9 degrés, mais ce qui me perturbe c'est les petites gouttes de pluie qui nous aspergent. Dans l'eau en premier de la vague. Elle est fraîche mais dès qu'on nage un poil je trouve ça agréable, vraiment pas de quoi en faire tout un plat. 5min, 2min, 1min, bonne course les gars, pistolet ne fonctionne pas...
Natation
Et pam départ! Une dizaine de tours de bras à coin, sur ma droite où je respire plus personne. Sous l'eau les bulles de Daniel à ma gauche. Passage à la bouée dans ses pieds, il est en tête. Il dévie un peu à droite, mais revient prendre le sillon du canoë. Je dois laisser partir là c'est beaucoup trop rapide. Mais je me fais plaisir, quelles sensations longtemps recherchées à l'entraînement ! Après 500-600m il faut baisser un poil le rythme, le but n'est pas non plus d'y laisser toutes mes forces. Au demi-tour Daniel a une (petite) bouée d'avance. Je me retourne mais personne dans mes pieds (et me prends la bouée au passage - concentration!). Sur le retour je comprends pourquoi Daniel déviait tout le temps, un petit courant nous pousse de travers. Je suis au large souvent mais gère encore assez bien de ne pas trop faire de détour. On rattrape quelques dames parties 20min avant nous. Je sors de l'eau deuxième, mais déjà à une bonne minute.
T1 merdique, où je peine à trouver mon sac (tombé par terre), n'arrive pas à enlever mes chevilles de la néoprène, et foire complètement ma montée sur le vélo. Pas grave c'est encore long.
Vélo
Et c'est parti pour le vélo. Moi qui pensait pouvoir profiter d'un parcours assez dégagé en sortant deuxième, je me suis lourdement trompé. Que des pelotons de dames à dépasser, souvent je suis en 3e-4e file. Je me sens pas bien non plus, de la peine à tirer sur mon vélo. Mais ce n'est que le début, et ça me permettra de gérer un peu. Petit gel comme prévu, je mange les 3/4 et merde il me glisse des mains. Bon il était quasi vide, pas grave. Je détache le deuxième du cadre déjà car le scotch de la veille arrive aussi au bout et je ne veux pas le perdre.
Dans la montée de Witche's Hill, c'est plus petite vitesse, bien tirer sur les jambes, et le long de la bordure gauche de la route pour dépasser. Certaines marchent déjà, hé ma coco il te reste 10 bornes de montées et un deuxième tour ! Les supporters reconnaissent qu'on est les premiers AG hommes et encouragent Chean-Klode en lisant sur la trifonction. La petite descente me crispe beaucoup, un homme me passe. Mais il va plus vite derrière sur le plat aussi. Deuxième bosse (The Beast), elle passe bien. Un peu plus dur la relance derrière. Mais je suis pas le seul. Et il me faut passer le milieu de la route lorsqu'un groupe de 5 femmes roulant ensemble restent de front toute la montée (nondedjou si je prends un carton pour ça elles vont m'entendre). C'est long jusqu'à Golden Station où je m'y prends à deux fois pour choper une gourde d'eau. Et ça monte encore. Puis enfin la descente. Et sur route mouillée mes peurs reviennent. J'arrête de pédaler, me ressaisis gentiment en laissant quelques dames me redépasser. Je les aurai sur la mini-bosse qui suit.
De retour au bord du lac, je suis pas très content de mon début vélo. Mal tiré le plat, et pas bien descendu, ça fait déjà 1h de route et il me reste tout le retour. Du coup clang clang quelques vitesses en plus et c'est parti pour le retour. Je reprends ma position en 2e-3e file quasi tout du long. Je croise Daniel vite fait vers le demi-tour, vide ma gourde d'eau devant et m'apprête à la jeter. Ah non c'est après le demi-tour. Bon en bouche pour le giratoire (et j'apprends à la fin de la course que la seule autre personne avec la même stratégie était Daniel, sans consultation préalable !).
1h13 passé, 5e position, plus lent que prévu, mais ça sera dur de progresser beaucoup sans prétériter la course. Sur le plat quelques relais me passent maintenant, mais c'est une allure que je n'arriverai pas à suivre. Deuxième montée, c'est raide, mais y'a toujours beaucoup de supporters ça fait du bien. La route sèche, je prends plus confiance dans les virages. La fin de la montée se fait bien sentir. Je roule plus dans la descente, mange mon gel au plus mauvais moment (petite rebosse sur les barres à 400W), et me retrouve coincé derrière un accident assez grave au centre de la route. Je freine, mais des gens s'en occupent déjà, et poursuis prudemment mon chemin.
Plus que le retour, un peu rapide sur le début puis en gestion contrôlée sur la fin pour bien boire et préparer la course. Dès qu'on quitte la route du premier tour plus personne, et la zone est quasi vide. Beau comme feeling !
Course à pied
T2 mieux gérée (bien que je cherche le sac 506 à Daniel plutôt que le mien ?), et hop en route pour le parcours course. Les jambes répondent bien, mais après 500m euphoriques à 3'30-3'40 faut revenir à la réalité et se placer en 4'00/km. J'ai de la peine à respirer, un peu mal au bide, des points, mais si les jambes vont bien pas de raison de s'arrêter. J'ai mon allure entre 4'00 et 4'05, je prends de l'eau et des éponges aux ravitos mais c'est tout pour l'instant. J'aurais de toute façon de la peine à avaler quelque chose d'autre. Après quelques kilomètres je peine un peu, m'accorde le droit à une gorgée de coca au ravito, toujours sans marcher. Puis ça va bien, même très bien. J'accélère un poil mais devrais me remettre à mon allure de 4min/km un peu plus loin. Les petites bosses du sous-voie et de Stairway To Heaven sans soucis, hop un chouchou jaune du premier tour. Plein de monde gueule mon nom, mais à part Estelle et PA je reconnais presque personne, je suis dans ma bulle. Le panneau 2e tour indique un demi-tour mais clairement ça va tout droit. Un peu confus, mais je continue. Le parcours commence à se peupler, ainsi lorsqu'à 14km je peine à nouveau je peux me dire en lisant les derrières des autres concurrents (socialement acceptable uniquement en course !) : "tiens Michelle, Paul, Christian, Jana ou autre est plus dans le dur que moi". Enfin j'arrive à nouveau aux escaliers, où Estelle me dit de m'accrocher à ma 3e place AG. J'apprécie beaucoup, elle court même presque plus vite que moi car je la recroise deux autres fois dans la ville. Mais je stresse un peu aussi à vrai dire, il reste 2.5km et j'arriverai très difficilement plus vite mais maintenant je me retourne une fois chaque 500m pour voir si ça revient derrière. Heureusement pas, et je peux passer la ligne toujours en 3e place, génial !
Daniel attend vers la ligne, il a gagné la catégorie ! Trop content. On cause un peu aussi avec d'autres concurrents, prend le verre d'eau auquel on a droit (scandale ! et un peu de sucre ?). Je reprends mon sac d'habits, me fais étaler du Perskindol, retrouve David, PA et Estelle vers la ligne, ainsi que notre reporter de la veille. Puis au fil de la journée des amis de toutes parts, sur place mais aussi via 118 messages Whatsapp ! J'ai mal, mais pas autant qu'à Troyes il y a deux ans. Faut dire que j'étais bien mieux préparé à la distance.
La journée traîne encore jusqu'aux awards. Daniel est champion suisse aussi, moi (malgré d'autres nouvelles entre-temps) pas sur le podium des championnats suisses car ils regroupent les catégories jusqu'à 34 ans. Pas grave, on a tous assuré nos perfs , tous ces mois ont bien servis. Une analyse suivra peut-être, mais maintenant place à un peu de repos puis vivement Zug dans deux semaines ! Car si l'objectif est passé, la saison ne fait que commencer.
par PA the 06-06-2016 at 09:42